Mariage
Dès mon premier jour, on m’invite à un mariage. Un des meilleurs amis de mon hôte. La cérémonie est en deux temps. Le samedi la soirée henné, surtout pour les femmes, et le lendemain dans un hôtel pour la cérémonie à proprement dites. Du café nous allons chez Shoaib, qui m’invite dans sa maison. Je vais pouvoir découvrir l’hospitalité afghane. Sa maison est sur une colline qui surplombe le centre-ville. Un très jolie maison entourée d’arbres fruitiers sur le devant, abricotiers, pêcher, cerisier, vigne. La relative hauteur de la maison par rapport au reste de la ville et les arbres permettent une douceur de l’air appréciable. Après un goûter de onze heure fait de fruits du jardin, petite sieste de quelques minutes sous les arbres. La vie est douce. Ensuite préparation pour l’après-midi. Comme je n’ai pas de vêtements parce que ma valise a été perdue, Sarah, la femme de Shoaib, me prête une tenue de type indien. Heureusement que les vêtements sont amples, nous ne sommes pas vraiment du même gabarit. La cérémonie de cet après midi est traditionnelle, la tenue sera sans doute plus adéquate qu’une robe qui bien que longue, est de style trop occidentale. Toute emmitouflée dans des voiles alors que dehors la température crève, c’est parti pour la fête.
Dans la voiture nous sommes six et un bébé, la femme de Shoaib est enceinte de cinq mois. Sur la route nous passons devant un camp d’entraînement de la police afghane tout neuf. D’ailleurs on voit absolument partout des bâtiments en construction. Partout. Sur le bord de la route des enfants demandent de l’argent aux voitures. Il y a des dos d’ânes partout parce que toutes les voitures roulent trop vite. Ils se mettent aux extrémités et toquent aux vitres. Malgré tout mes voiles, on voit encore mes cheveux blonds. C’est une situation gênante, ils toquent plus fort aux portes. On se sent impuissant. L'Afghanistan, bien qu’on veuille en tirer le maximum de points positifs possibles, reste un des pays les plus pauvres du monde.
Sur le bord de la route beaucoup de vendeurs ambulants proposent des cerises, des légumes, du jus de citron (qu’il faudra que je goûte un de ces jours !). On peut voir dans l’album photo ce qu’on peut considérer comme un repas basique. Il se compose de beaucoup de légumes crus comme du concombre, des carottes, des radis, des pousses d’oignons coupés en rondelles. Il y a aussi des piments verts et du chou.
Continuons notre route vers le mariage. Comme nous sommes partis un peu en avance, arrêt au seul lac de Kaboul. Sur le bord, des cabanes de vendeurs de tout et en arrière une lumière de fin d’après-midi qui auréole un paysage de montagnes impressionnantes. Les fameuses montagnes afghanes. Kaboul est sans qu’on s’en aperçoive à 2000 mètres d’altitude. Le lac est encore plus haut. La température autour est plus agréable qu’en ville et c’est ici que viennent des familles le vendredi, jour de repos. Parmis les boutiques je remarque pour la première fois depuis que suis arrivée un vendeur de viande. Les carcasses de moutons pendent dans la devanture. Miam ! Quelques photos et on se ré-entasse. Shoiab jète sa bouteille vide par la fenêtre. On arrive alors juste une dizaine de minutes plus tard dans un village. Les routes sont encore plus défoncées qu'en ville, j'ai vu dans la journée de gros nids de poule.
Dans la maison de la mariée les hommes et les femmes sont séparés. Certaines femmes arrivent en burqua. J’assiste à la transformation, du poisson à la femme. Déplier vers l’arrière, les plis du tissu font penser à ses formes. Anonyme dans la rue, elles deviennent des personnes ayant des enfants, rigolant et dansant ensembles.
La fête se déroule dans une petite cours, les enfants courent partout. On me regarde avec amusement et interrogation et on pose des questions à la femme de Shoiab et à sa sœur qui est venue avec nous. La mère de Shoaib veut absolument me faire danser. C’est hors de question ! Mais elle me relance plusieurs fois. Deux garçons d’environ treize ans jouent et chantent, l’un du tambour, l’autre d’une sorte d’accordéon posé à terre, comme un piano à souflé qu’il actionne d’une main et dont il joue de l’autre. Des femmes en tenues de fête dansent au milieu sur des tapis (première industrie du pays !) et les autres regardent, assises sur des cousins colorés. Premier jour et j’assiste à une fête de mariage ! Un caméraman vient plusieurs fois. Il est assisté d’un porteur de lumière, qui allume sa lampe quand la caméra commence à tourner. Enfin la mariée et le marié entrent dans la courette (le marié peut venir chez les femmes mais pas le contraire, les hommes ne doivent pas la voir). Elle porte une robe improbable et ses cheveux sont attachés en un chignon très sophistiqué. Son fond de teint est très blanc et ses yeux et lèvres qui brillent de paillettes tranchent sur sont visage ainsi éclairci. Elle ne sourit pas. On ne doit pas sourire. Ils prennent la pose devant le cameraman comme s’ils prenaient une photo, cela dur au moins une minute à chaque fois avec toutes les femmes importantes du couple d’abord, deux par deux, puis celles qui le veulent. Il lui met au doigt devant la caméra toujours, une bague en or. Les afghanes adorent l’or. Puis on ramène une sorte de pièce montée contenant du henné dans lequel baignent des bougies. J’ai l’honneur de mettre sur la main de la mariée le premier pâton de henné. Selon la tradition, celles qui font cela seront mariées dans l’année. Well we’ll see, comme on dit là bas. Un peu comme notre bouquet. Je suis sous les feux de la rampe, tout le monde est autour et toujours cette caméra à la lumière trop forte. Le rouge me monte aux joues. On re-danse de plus belle, puis rapidement les femmes se préparent. Nouvelle transformation. Beaucoup de celle que j’ai vue danser se métamorphose en poisson bleu.
On remonte dans la voiture direction de la maison du marié où se déroulera le diner. Les femmes sont à nouveaux réunis, dans le salon cette fois ci. Le diner fait de riz, de beaucoup de pain et de boulettes de viande est vraiment très bon. Description rapide de la futur chambre des mariés : des cousins roses et un dessus de lit en satin du même rose où se dessine la forme d’un gros cœur. Retour à la maison il est une heure du matin. Je dois avouer que je suis crevé. L’avion était de nuit. Je n’ai donc pas trop dormi la nuit précédente.
Le dimanche, le mariage à proprement dis, le rendez vous est donné dans un des nombreux hôtels de la capitale.